lundi 27 février 2017


Un brin d'analyse du vocabulaire de la novlangue

Du politiquement incorrect

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ü     Bien-pensance



L’expression paraît dérivée d’une autre, d’origine américaine, le political correctness et utilisée d’abord sur les campus universitaires depuis les années 1980, pour tourner en dérision les discours de gauche qui ne diraient pas vraiment les choses comme elles sont (seraient) afin de ne pas choquer les minorités.

Dans l’une comme l’autre, les valeurs de correction et de bien sont détournées et tirées en dérision. Il faudrait donc entendre en réalité : le soi-disant politiquement correct ; la soi-disant bien-pensance. Autrement dit, en décodé, tout le contraire : le pseudo correct est incorrect en politique et le pseudo bien est le fléau de la pensée morale.


Il y avait, je pense, quelque chose de réellement interpellant à l’origine de ces trouvailles de langage. Rien de plus stérile en effet que l’attitude (de gauche) plutôt que la pensée. Et il y a certainement une responsabilité de la gauche à s’être opposée jusque dans un passé récent, et par principe, à tout discours de sécurité, et d’avoir minimisé gravement le danger du fondamentalisme islamiste par crainte d’aggravation du racisme anti-arabe, lui-même patent en terre européenne.


Mais le problème de telles expressions vient de leur abus et de la paresse intellectuelle qu’elles génèrent. Comme pour le mot idéologie / idéologique, celui de bien-pensance finit hélas par ne plus signifier en fait que qui ne pense pas comme moi, pour peu que ce moi soit, si pas de droite, au moins de gauche déçue.

On traque la bien-pensance partout, on se muscle à l’appui de penseurs ou surtout de pseudo penseurs (souvent exclusivement médiatiques), et on plombe tout essai de pensée qui s’arc-boute encore sur des valeurs comme la solidarité, le droit à la différence, l’accueil de l’étranger, la lutte contre l’inégalité des conditions sociales, et on moque l’effort des  rares politiques du vivre ensemble d’un simple qualificatif devenu exclusivement péjoratif : multiculturel.


Oui, il y a bien une novlangue de droite, et elle me paraît inquiétante, beaucoup plus aujourd’hui que les probablement justes attaques contre cette gauche dite bien-pensante ne le furent pour elle-même, et qui en effet hier encore (sans doute avant les premiers gravissimes attentats à Paris) minimisait le risque islamiste pour sans doute ne pas heurter ni stigmatiser toute une communauté.


Désolée d’en être convaincue, mais je crois en effet qu’au regard de l’histoire européenne, l’extrême-droite a constitué un danger jusqu'ici bien plus grave que l’extrême-gauche. Et ce sans doute d’abord et tout bêtement parce que la première peut séduire les classes populaires en masse de façon immédiate, et que la seconde exige souvent des analyses  théoriques (fussent-elles tronquées) ; raison pour laquelle il n’y a eu jusqu’ici que des groupuscules terroristes de cette mouvance extrême, tels la Fraction Armée Rouge, la Bande à Baader, Action Directe ou les CCC en Belgique. Aucun de ces groupuscules n’a jamais pu fédérer l’once d’un début de soutien populaire. Par contre, à l’apogée du nazisme, plus de 90% du peuple allemand soutenait la politique d’Adolf Hitler et son parti unique.

Ce qui est dangereux, c’est quand des personnalités, de formation universitaire par exemple, se mettent à snober les exigences de la pensée elle-même et à lancer des anathèmes tout faits contre ceux qui leur avancent l’une ou l’autre objections, caricaturant et diabolisant leur point de vue à coup de formules entendues : « Bien-pensants », « idiots utiles », « islamo-gauchistes » "droits-homministes" and so on…


   Ce qui est dangereux en fait, c’est quand on n’a plus le courage de penser tout court.



   On ne doit plus trop s’étonner alors que l’heure facile et dominante vire à la post-vérité.


2 commentaires:

  1. Commentaire qui n'a rien à voir aux textes mis en ligne... mais dont l'objet est une reprise de contact et peut être avec ce blog un moyen de (au moins de temps à autre) se croiser et recroiser entre bien-pensants, au moins celle et ceux des premiers congrès (un musul, un youtre, une philosophe, un apatride et un socialo) avec l'espoir d'y adjoindre l'ami Pierre (Pyro) et peut-être Nolats, Hubert41...

    À suivre donc. Bref, le blog de plumeplume comme mini réseau social de la bienpensance...

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  2. Oh ! Bruno, je ne découvre ton commentaire que ce jour.
    Je n'ai plus rien écrit ici depuis longtemps et n'y suis plus passée depuis des lunes...

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